Page:Conon de Béthune - Chansons, éd. Wallensköld, 1921.djvu/16

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Conon, V, 37-38 :

Dehait li bers qui est de tel sanblance
Con li oixel qui conchïet son nit,

et R. 1030, 21 :

Or est venuz son lieu reconchïer.

Contenu et style des chansons. — Les chansons de croisade IV et V, qui sont sûrement de Conon de Béthune, se distinguent par un style vif et énergique, avec le mélange traditionnel d’enthousiasme religieux et de regrets amers d’être obligé de quitter la dame aimée. C’est dans V (v. 51) que se trouve l’allusion à Huon d’Oisi, mentionnée plus haut. La pièce X est un spirituel débat entre un chevalier et une dame qu’il avait jadis aimée d’un amour malheureux. La dame, vieillie, est prête à céder, mais trop tard : le chevalier renonce à ses faveurs. Dans cette chanson sont nommés deux grands personnages de la fin du XIIe siècle : li Marchis (v. 39), probablement le marquis Boniface II de Montferrat, un des héros de la quatrième croisade, qui a régné de 1192 à 1207, mais devait être, au moins depuis 1187, corégent de son frère aîné Conrad, parti cette année-là pour l’Orient et mort assassiné en 1192[1], et li Barrois (v. 40), Guillaume des Barres, connu pour sa force prodigieuse et qui, vers 1188, vainquit Richard Cœur de Lion dans un combat singulier[2].

Toutes les autres chansons sont des « chansons d’amour », qu’on peut diviser en deux catégories : celles où le poète apparaît comme l’amant fidèle et humble (I, II, III) et celles où il accuse sa dame de trahison et de félonie (VI, VIII et IX). Dans VII, le couplet I appartient à la première catégo-

  1. Voir L’Art de vérifier les dates, 3e éd., t. III (Paris, 1787), p. 632 b ; cf. O. Schultz, ouvr. cité, p. 448.
  2. Voir H. -F. Delaborde, Œuvres de Rigord et de Guillaume le Breton, t. II (Paris, 1885), 1. III, v. 431-435 et 485 et suiv.