Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/172

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

À ces mots, il asséna un coup de poing si violent sur la tête du soldat qui le tenait par son pourpoint, que le pauvre diable chancela et tomba lourdement sur le pavé de la salle, comme un bœuf abattu par la massue ; puis, s’élançant comme l’éclair au milieu des gardes stupéfaits, il en renversa plusieurs, se fit un large passage, et parvenu à la porte, il se retourna et cria d’une voix tonnante :

— Vous le payerez cher, mes nobles seigneurs ! Garrotter un boucher de Bruges !! porter la main sur moi ! Oh ! malheur à vous, tyrans maudits… Écoutez ! écoutez ! Voilà le tambour des bouchers qui vous annonce la mort !

Il eût probablement continué ses menaces, mais il vit les gardes qui s’avançaient ensemble, et alors il se précipita dans l’escalier toujours en maugréant.

On entendit, en ce moment, de l’autre côté de la ville, gronder un bruit sourd pareil à un tonnerre lointain. Les léliards pâlirent, et la terreur les prit à l’approche de ce menaçant orage. Ils ne voulurent cependant pas remettre leur captif en liberté, et placèrent un plus grand nombre de gardes devant le Princenhof, pour le défendre contre les attaques du peuple ; ils se firent aussi accompagner par des gens d’armes jusqu’à leurs demeures.

Une heure après, toute la ville était en insurrection. La cloche d’alarme sonnait, les tambours des métiers parcouraient toutes les rues, et de sinistres grondements, semblables aux bruits avant-