Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/275

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un certain temps, et il y employa ses nobles mains avec résignation ; enfin il apporta à son cheval toute une brassée de fourrage frais… Le soleil était monté sur l’horizon et avait illuminé la campagne de couleurs éclatantes ; par la fenêtre de la salle il entrait assez de lumière pour qu’on pût distinguer tous les objets qui se trouvaient par terre. Le chevalier y rentra. La jeune fille se trouvait assise sur le lit et regardait avec stupéfaction les murs noirs de son horrible demeure ; elle ouvrait démesurément les yeux et paraissait égarée, car ses paupières ne s’abaissaient pas et restaient obstinément levées. Dès que le chevalier l’eut regardée de près, un tremblement soudain parcourut son corps ; il pâlit et sentit que le froid de la peur lui coupait la parole, il ne sortit de sa bouche que des sons inarticulés. Dans cette agitation il s’élança vers la jeune fille qu’il embrassa et la pressa avec amour contre son cœur.

— Mon enfant ! ma pauvre Mathilde ! cria-t-il avec désespoir, devais-je quitter ma prison pour cela ? pour te retrouver ainsi entre les bras de la mort !

La jeune fille mit la main avec dégoût contre la poitrine du chevalier et le repoussa avec colère.

— Traître ! dit-elle, comment osez-vous maltraiter ainsi la fille du comte de Flandre ? Vous ne rougissez pas d’enlever une jeune fille sans défense, mais Dieu veille sur moi. Sa foudre n’est pas éteinte, entendez-vous ? Votre punition approche. Écoutez comme le tonnerre gronde, scélérat !…