Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/437

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À mesure que les travaux de terre s’achevaient, d’autres hommes venaient y adosser des tentes. De temps en temps, les travailleurs laissaient leurs outils enfoncés dans le sol, et montaient à la hâte sur le retranchement ; alors une clameur triomphale courait dans toute l’armée, et le cri : « Flandre au Lion ! Flandre au Lion ! » retentissait au loin comme une joyeuse réponse. Cela avait lieu chaque fois qu’un renfort arrivait d’autres villes.

Le peuple flamand avait, un peu à tort, accusé la noblesse de félonie et de couardise ; il est vrai qu’un grand nombre de seigneurs s’étaient ouvertement déclarés pour les Français ; mais le chiffre de ceux qui étaient demeurés fidèles à la cause de la patrie était plus considérable que celui des renégats. Cinquante-deux d’entre les principaux chevaliers flamands étaient captifs en France ; assurément c’était l’amour de leur pays et le dévouement à leur souverain qui les y avait contraints ; quant aux nobles restés en Flandre, s’ils ne s’étaient pas joints aux communes insurgées, c’est parce qu’ils regardaient le champ de bataille comme le seul lieu où ils pussent faire preuve dignement de courage et de dévouement. Les mœurs du temps leur avaient donné ces sentiments ; car il y avait alors autant de distance entre le chevalier et les gens des communes, qu’il y en a aujourd’hui entre le maître et son domestique. Aussi longtemps que la lutte s’était concentrée dans l’enceinte des villes et avait été dirigée par les chefs