Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/544

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insondables profondeurs la digue qui l’arrête, et, répandant ses vagues écumantes dans les campagnes, déracine les forêts et renverse les villes, ainsi s’élança l’armée flamande à l’appel du chevalier inconnu.

Les Français furent assaillis avec une telle rage, qu’au premier choc, des rangs entiers furent abattus : les coups de massue et de hache tombaient aussi dru que la grêle qui anéantit les fruits de la terre. Jamais on ne vit lutte aussi acharnée ; tous les combattants étaient couverts de sang, et beaucoup avaient encore leur arme au poing alors qu’ils étaient depuis longtemps atteints d’un coup mortel. C’était un fouillis d’hommes et de chevaux qui échappe à toute description. Les plus sinistres cris de mort, les plaintes les plus déchirantes, se confondaient en une seule clameur lugubre et formidable, qui attisait davantage encore la rage dans les cœurs. Les cavaliers français ne pouvaient plus se mouvoir ; car, de toutes parts, on les refoulait sur ceux qui les suivaient, tandis que les haches et les épées faisaient, dans leurs premiers rangs, leur œuvre horrible.

Le chevalier à l’armure dorée s’était frayé, grâce à sa formidable hache d’armes, un passage à travers l’ennemi, et s’était rapproché de l’oriflamme de France ; Guy et Arnould d’Audenaerde l’avaient suivi avec quelques-uns des Flamands les plus intrépides. Il chercha, mais en vain, à découvrir, aux alentours de la bannière, le panache vert d’Adolphe de Nieuw-