Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/101

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Non, répondit le gentilhomme, je ne vous la refuserais pas ; c’est même avec une véritable joie que je vous confierais le bonheur de mon unique enfant ; mais il existe un obstacle que vous ne connaissez pas…

— Un obstacle ? dit le Jeune homme avec un soupir et en pâlissant visiblement ; un obstacle entre moi et Lénora ?

— (Contenez votre amour pour un instant, reprit monsieur de Vlierbecke, et écoutez sans préoccupation l’explication que je vais vous donner. Vous croyez, Gustave, que le Grinselhof et les biens qui en dépendent sont ma propriété ? Vous vous trompez ; nous ne possédons rien. Nous sommes plus pauvres que le paysan qui habite cette ferme devant la porte…

Le jeune homme regarda quelques instants son interlocuteur avec surprise et doute ; mais bientôt sur son visage se peignit un sourire d’incrédulité qui fit rougir et trembler le gentilhomme. Celui-ci reprit avec un accent plein de tristesse :

— Ah ! je vois dans vos yeux que vous n’ajoutez pas foi à mes paroles. Pour vous aussi je suis un avare, un homme qui cache son or, qui laisse manquer du nécessaire lui et son enfant pour amasser des trésors, et sacrifie tout à l’abjecte passion de l’argent ? Un ladre que l’on craint et que l’on méprise ?

— Oh ! pardonnez-moi, monsieur de Vlierbecke, s’écria Gustave avec anxiété ; ma vénération pour vous est sans bornes…

— Ne vous effrayez pas de mes paroles, dit le gentilhomme d’une voix plus calme ; je ne vous accuse pas,