Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/107

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

monde avec mon mari, et peut-être devrais-je le suivre au milieu des fêtes et des réjouissances ? Mais je n’aurais plus un instant de repos ; où que je me trouvasse, la voix de la conscience crierait dans mon cœur : Fille ingrate et insensible, ton père souffre ! Oui, j’aime Gustave ; il m’est plus cher que la vie, et je recevrais sa main comme un bienfait de Dieu, et pourtant s’il me disait : abandonnez votre père ! s’il me donnait à choisir entre vous et lui… je le repousserais ! Je serais triste, je souffrirais horriblement, je mourrais peut-être, mais du moins dans vos bras, mon père !

Elle pencha un instant la tête, comme courbée sous le poids d’une triste pensée : mais elle fixa immédiatement sur les yeux de son père un regard courageux et ajouta :

— Vous doutez de l’affection de Gustave pour vous ? Vous le croyez capable de remplir votre vie de chagrin T de me séparer de vous ? Ô mon père, vous ne le connaissez pas ! Vous ne savez pas combien il vous respecte et vous aime ! Vous ne savez pas quels trésors de bonté et d’amour renferme son cœur !

Monsieur de Vlierbecke attira vers lui sa fille enthousiasmée, et posa sur son front un doux baiser. Il songeait à la calmer par des paroles consolantes, mais soudain Lénora se dégagea de son bras souriante et tremblante à la fois. Le doigt tendu vers la fenêtre, elle semblait écouter un bruit qui s’approchait.

Le trépignement des chevaux et le roulement des roues sur le chemin firent comprendre à monsieur de Vlierbecke ce qui était venu si soudainement troubler sa fille. Son visage aussi s’anima d’une expression de joie :