Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/119

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En prononçant ces mots, il s’affaissa sur une chaise, brisé par la foudroyante émotion qui l’accablait. Lénora s’approcha de son père, appuya la tête sur son épaule, et dit d’une voix entrecoupée de sanglots :

— Ne le revoir jamais ! Renoncer à son amour, perdre ce bonheur si longtemps rêvé ! Hélas ! hélas ! il en mourra de chagrin…

— Lénora ! Lénora ! dit le gentilhomme d’un ton suppliant.

— Oh ! mon père bien-aimé, s’écria la jeune fille, perdre Gustave pour toujours ! Cette affreuse pensée m’accable ; tant que je serai près de vous, je bénirai et je remercierai Dieu… Mais les larmes m’étouffent maintenant ; ah ! je vous en prie, laissez-moi pleurer !

Monsieur de Vlierbecke serra plus étroitement sa fille sur son sein, et respecta silencieusement l’affliction de l’infortunée Lénora.

Un silence de mort régnait autour d’eux. Ils restèrent longtemps enlacés dans les bras l’un de l’autre, jusqu’à ce que l’excès même de la douleur relâchât leur étreinte et ouvrît leurs cœurs à de mutuelles consolations.


VI


Quatre jours s’étaient écoulés depuis que monsieur Denecker avait refusé de consentir au mariage de Gustave avec Lénora, lorsque parut dans la lande de bruyère, à une demie-lieue environ du Grinselhof, une voiture de