Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/151

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Lénora, et que sa seule consolation était l’espoir de pouvoir un jour lui être uni par les liens du mariage. Mais, d’un autre côté, sa lettre n’était pas aussi encourageante : il y disait, en se plaignant tristement, que tous ses efforts pour amener son oncle à changer de résolution étaient jusque-là demeurés vains. Il ne dissimula pas à Lénora qu’il n’avait plus aucun espoir dans la possibilité de son union avec Gustave, et qu’il serait sage à elle-même d’oublier ce malheureux amour pour ne pas se préparer de nouveaux chagrins.

Maintenant que la pauvreté de son père était publiquement connue, Lénora elle-même était convaincue qu’il lui fallait renoncer à toute espérance ; cependant elle se sentait heureuse et fortifiée par la pensée que Gustave l’aimait encore, que celui dont, le souvenir et l’image remplissaient son cœur songeait toujours à elle et gémissait de son absence !

Elle aussi tenait fidèlement ses promesses : que de fois elle prononçait dans la solitude le nom de son bien-aimé ! que de soupirs s’échappaient de son sein sous le catalpa, comme si elle eût voulu confier au zéphyr la mission de porter vers des climats plus doux les vœux de son âme ! Elle redisait seule ses plus tendres aveux, et dans ses promenades rêveuses sous l’ombrage des chemins préférés elle s’arrêtait à chaque endroit où un mot, un serrement de main, un regard de lui l’avait émue…

Comme si tous les malheurs qui pouvaient briser le cœur du gentilhomme devaient l’accabler à la fois, il reçut d’Amérique la nouvelle de la mort de son frère. L’infortuné avait succombé à une cruelle maladie de lan-