Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/155

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semblait que chaque objet arrachait un souvenir de son cœur saignant…

La vente touchait à sa fin lorsqu’on détacha du mur, pour les mettre aux enchères, les portraits des hommes éminents qui avaient porté le nom de Vlierbecke. Le premier, — celui du héros de Saint-Quentin, — fut adjugé à un vieux fripier pour un peu plus de trois francs !

Il y avait dans la vente de ce portrait et dans le prix dérisoire qu’on en avait donné une si amère ironie pour le gentilhomme que, pour la première fois, le supplice qui torturait son âme se fit jour sur son visage. Il baissa les yeux et s’abîma dans de sombres et pénibles réflexions ; après quoi il releva le front, et, en proie à une visible émotion, il quitta la salle pour ne pas être présent à la vente des autres portraits…

Le soleil n’avait plus à fournir que le quart de sa course quotidienne pour atteindre l’horizon.

Au Grinselhof, un silence de mort a remplacé la foule avide des brocanteurs ; il n’y a plus personne dans les chemins solitaires du jardin ; la porte est refermée, tout est rentré dans le calme accoutumé : on dirait que rien ne s’est passé dans ces lieux.

La porte de l’habitation de monsieur de Vlierbecke s’ouvre ; deux personnes paraissent sur le seuil : un homme déjà avancé en âge et une jeune fille. Ils portent tous deux un petit paquet à la main et semblent prêts à se mettre en voyage.

Il est difficile sous ces humbles vêtements de reconnaître monsieur de Vlierbecke et sa fille ; on ne s’en