Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/170

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et sérieusement. Je n’ai pas le droit de vous demander quels sont vos projets, et moins encore le droit de supposer que ces projets puissent être autres que respectables de tout point. Votre dessein est donc d’épouser mademoiselle Lénora ?

— C’est mon dessein immuable ! répondit le jeune homme.

— Immuable ? reprit le notaire, soit ! Mais la confiance que m’a toujours témoignée votre vénérable oncle et mon titre de notaire m’imposent le devoir de vous mettre sous les yeux, avec sang-froid, ce que vous allez faire. Vous êtes millionnaire, vous portez un nom qui, dans le commerce, représente à lui seul un important capital. Monsieur de Vlierbecke ne possède rien ; sa ruine est connue de tous, et le monde, injuste ou non, condamne le gentilhomme ruiné à l’ignominie et au mépris. Avec votre fortune, votre jeunesse, votre extérieur, vous pouvez obtenir la main d’une opulente héritière et doubler vos revenus.

Gustave avait écouté les premiers mots de cette tirade avec une impatience pénible ; mais bientôt il avait détourné les yeux pour songer à d’autres choses. Il se retourna tout à coup vers le notaire, interrompit son discours et répondit d’un ton bref :

— C’est bien, vous faites votre devoir ; je vous remercie ; mais assez là-dessus. Dites-moi, à qui appartient le Grinselhof aujourd’hui ?

Le notaire parut plus ou moins déconcerté de l’interruption et du peu d’effet de ses conseils ; cependant, il dissimula son dépit dans un malin sourire, et répondit :