Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/186

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quelque sorte enfoncés dans l’orbite, son regard était morne et languissant, ses joues pâles, toute sa physionomie altérée et abattue. On s’apercevait qu’une grave maladie avait affaibli en même temps chez lui les forces du corps et celles de l’âme.

Il était très-pauvrement vêtu. On voyait bien pourtant qu’il avait longtemps lutté pour cacher les traces de la misère ; on n’eût pu découvrir sur ses habits ni une tache, ni un grain de poussière, mais l’étoffe en était usée jusqu’à la trame ; çà et là se trahissaient des raccommodages mal dissimulés ; en outre, ses vêtements étaient trop amples et trop larges pour son corps amaigri. Peut-être l’infortune et la maladie avaient-elles énervé l’âme forte et virile du gentilhomme, peut-être son courage était-il abattu et son cœur brisé !

Lénora le contempla un instant avec une profonde affliction.

— Mon Dieu, mon père, êtes-vous redevenu malade ?

— Non, Lénora, répondit-il ; mais j’ai tant de malheur !

La jeune fille l’embrassa tendrement, et en serrant sa main d’une étreinte caressante :

— Père, père, reprit-elle, il y a huit jours à peine vous étiez encore au lit, faible et souffrant. Nous avons demandé au ciel votre rétablissement comme le plus grand bonheur qui pût nous être accordé sur la terre. Dieu a exaucé nos prières : vous êtes guéri… et voilà que vous vous désolez de nouveau dès la première contrariété. Vos démarches n’ont pas réussi aujourd’hui, n’est-il pas vrai ? Je le vois sur votre visage attristé. Eh bien ! qu’est-ce que