Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/187

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cela fait ? En quoi cela nous empêche-t-il d’être heureux ? Allons, allons, sachons comme autrefois lutter contre le destin ; soyons forts, et regardons la misère en face et la tête levée : le courage est aussi une richesse. Ainsi, père, oubliez votre chagrin ; regardez-moi, suis-je triste ? Est-ce que je me laisse abattre par des pensées de désespoir ? Oui, j’ai pleuré, j’ai gémi, j’ai souffert parce que vous étiez miné par la maladie… Mais maintenant, vous êtes guéri ;’maintenant vienne ce qui voudra, votre Lénora remerciera toujours Dieu de sa bonté !…

Le père, souriant doucement à la courageuse exaltation de sa fille, répondit avec un soupir :

— Pauvre Lénora ! tu cherches à te rendre forte pour me raffermir et me consoler. Que le ciel te récompense de tant d’amour ! Je sais où tu puises tout ton courage ; et cependant, cher ange que Dieu m’a donné, ta parole et ton sourire ont une telle puissance sur moi, qu’on dirait qu’une part de ton âme passe avec eux dans mon âme. Je suis revenu le cœur brisé, la tête perdue, affaissé par le désespoir ; ton regard a suffi pour me consoler…

— Allons, père, dit la jeune fille en l’interrompant et en multipliant ses caresses, racontez-moi vos aventures ; Je vous dirai ensuite quelque chose qui vous réjouira.

— Hélas ! mon enfant, je me suis rendu au pensionnat de monsieur Roncevaux pour reprendre mes leçons d’anglais. Pendant ma maladie, un Anglais en a été chargé ; nous avons donc perdu notre meilleur morceau de pain.

— Et la leçon d’allemand de mademoiselle Pauline ?

— Mademoiselle Pauline est partie pour Strasbourg ;