Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/189

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mon père, qui m’a donné tout cet ouvrage ? C’est la riche dame qui habite la maison à porte cochère du coin de la rue. Elle m’a fait appeler ce matin, et je suis allée chez elle pendant votre absence. Vous êtes surpris, n’est-ce pas, père ?

— En effet, Lénora. Tu parles de madame de Royan pour laquelle on t’avait chargée de broder ces beaux cols ? Comment te connaît-elle ?

— Je ne le sais pas. Probablement la maîtresse qui m’a confié ce travail difficile lui aura dit qui l’avait fait. Elle doit même lui avoir parlé de votre maladie et de notre pauvreté ; car madame de Royan en sait sur nous bien plus que vous ne pourriez le supposer.

— Ciel ! elle ne sait cependant pas…

— Non, elle ne sait rien ni sur notre nom, ni sur notre pays…

— Continue, Lénora ; tu piques ma curiosité. Je vois bien que tu veux me tourmenter.

— Eh bien, père, puisque vous êtes bien fatigué, je vais abréger. Madame de Royan m’a reçue avec beaucoup d’affabilité ; elle m’a fait compliment sur mes belles broderies, puis elle m’a interrogée sur nos malheurs passés, et m’a consolée et encouragée. Et voici ce qu’elle m’a dit en me faisant donner la toile par sa femme de chambre ; « Allez, mon enfant, travaillez avec courage et soyez toujours aussi sage : je serai votre protectrice. J’ai moi-même passablement de couture à faire faire ; vous allez travailler pour moi seule pendant deux mois, peut-être ; mais ce n’est pas assez : je vous recommanderai à mes nombreuses connaissances ; et je veillerai à ce que vous