Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/20

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De temps en temps m soupir s’échappait de sa poitrine oppressée, et des larmes se faisaient jour à travers les doigts qui cachaient ses traits. Cependant, au moindre mouvement de l’enfant elle levait la tête en tremblant, contemplait en sanglotant et avec une morne terreur ces joues flétries, ramenait la couverture sur ses membres glacés et retombait ensuite, pleurante et désespérée, sur la pierre.

Le plus profond silence régnait dans ce lieu de désolation, et ce silence n’était troublé que par la neige qui fouettait les vitres et par les hurlements plaintifs du vent dans la cheminée.

Depuis quelque temps la femme paraissait assoupie ; l’enfant n’avait pas bougé, et elle n’avait pas levé la tête ; elle semblait même ne plus pleurer, car les larmes avaient cessé de briller entre ses doigts. La chambre était comme un tombeau qui a reçu ses hôtes et qui ne doit plus se rouvrir.

Tout à coup une voix faible, venant du côté du foyer, murmura :

— Maman, chère maman, j’ai faim !

Celui qui faisait entendre cette plainte était un petit garçon de cinq ou six ans, accroupi dans le coin de la cheminée, et tellement ramassé sur lui-même auprès du feu, qu’on eût eu peine à l’apercevoir. Il tremblait et grelottait comme s’il eût eu la fièvre, et avec plus d’attention on pouvait entendre ses dents claquer de froid.

Soit que la femme n’eût pas entendu sa plainte, soit qu’elle fût dans l’impossibilité de satisfaire à sa demande, elle ne répondit pas et demeura dans son immobilité. Le