Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/219

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sous ses baisers les larmes amères qui baignent ses joues, et laisse échapper d’inintelligibles paroles d’anxiété et d’amour.

Enfin la pauvre femme abattue, épuisée et toujours pleurant va s’affaisser sur le banc.

Jean embrasse précipitamment son grand-père et la mère de Trine ; il se dégage avec une douce violence de l’étreinte de son petit frère au désespoir, court encore à sa mère, la serre dans ses bras, dépose un baiser sur son front et s’écrie d’une voix déchirante :

— Adieu !

Et, sans oser se retourner, il marche rapidement dans la direction du village, jusqu’à ce que au coin du bois, il ait disparu aux yeux de ses parents.

Trine, qui portait sous le bras le pain de seigle le suivait avec peine et parvint difficilement à le rejoindre.

Les deux jeunes gens marchent quelque temps l’un à côté de l’autre sans se parler ; leur cœur bat très-vite ; une vive rougeur colore leur front et leurs joues ; ils n’osent se regarder l’un l’autre. Heure solennelle où deux âmes tremblent devant un aveu, et sentent qu’un secret sacré va leur échapper.

Jean cherche timidement la main de Trine ; il la saisit ; mais comme si ce contact eût été un crime, comme si cette main l’eût brûlé, il la laissa aller en frémissant.

Toutefois, après un instant de silence il reprit cette main et dit d’une voix étrange :

— Trine, ne m’oublieras-tu pas ?

La jeune fille ne répondit que par ses larmes.