Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/225

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— Allons, bon voyage, Trine ! cria Jeanne reprenant son chemin. Tâche de faire ta lettre, et fais bien nos compliments à Jean !

— Jusqu’à dimanche après la grand’messe ; je pourrai te dire alors comment ça aura été… Dis bonjour pour moi à ta sœur…

La voix de Jeanne résonnait déjà sous les sapins ; elle chantait sur un rhythme joyeux et à plein gosier le refrain de la chanson de mai bien connue :

Le mai, sous les rubans, balance
Son jeune sommet verdoyant ;
Filles et garçons en cadence
Tout alentour dansent gaîment,
Filles, garçons, tant que vous êtes,
Mettez à profit les beaux jours.
Et passez la jeunesse en fêtes,
Quand elle part, c’est pour toujours !



Trine demeura immobile et rêveuse jusqu’à ce que la jolie voix de son amie se perdît dans les profondeurs du bois. Elle s’élança alors dans le chemin, demi-dansant demi-marchant, et fut bientôt à la maison.

Les deux veuves assises près de la table attendaient impatiemment son retour. Le grand-père, qui avait un rhume et était couché dans l’alcôve, passa la tête entre les rideaux au moins pour être témoin oculaire et auriculaire de la grande œuvre qui allait s’entreprendre.

Dès que la jeune fille parut sur le seuil, les deux femmes rassemblèrent en toute hâte les objets qui se trouvaient sur la table, et essuyèrent celle-ci avec le coin de leur tablier.