Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/228

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Il faudrait mettre quelque chose avec. Ne serait-ce pas mieux de mettre cher fils ou cher enfant ?

Trille entendit à peine ces paroles ; elle était occupée à lécher le papier, et s’écria à demi fâchée :

— Voyez ce qui arrive ! Une grande tache sur le papier, et j’ai beau lécher, elle ne s’en va pas. Il me faut prendre l’autre feuille.

— Eh bien, qu’en dis-tu, Trine ? Cher fils ! c’est toujours beaucoup plus beau, n’est-ce pas ?

— Non, je ne veux pas y mettre cela non plus, murmura Trine avec dépit. Est-ce que je puis écrire à Jean comme si j’étais sa mère ?

— Que vas-tu donc mettre ?

Une pudique rougeur monta au front de la jeune fille, tandis qu’elle répondait :

— Si j’écrivais cher ami ? Ne trouvez-vous pas que ce serait le mieux de tout ?

— Non, je ne veux pas cela non plus, dit la mère ; mets encore plutôt Jean tout court.

Bien-aimé Jean ? demanda la jeune fille.

— Oui, c’est bien ainsi ! dirent ensemble tous les autres enchantés de cette solution de la difficulté.

— Restez donc tous loin de la table, s’écria Trine, et retenez Paul pour qu’il ne me pousse pas !

La jeune paysanne se mit à l’œuvre. Au bout d’un instant, de grosses gouttes de sueur perlaient déjà sur son front ; elle retint son haleine, et son visage devint pourpre. Bientôt un long soupir s’échappa de sa poitrine et comme si elle se fût sentie délivrée d’un poids énorme, elle s’écria avec joie :