Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/252

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— Malheureuse que je suis ! Qu’ai-je eu à souffrir là, mon cher François ! dit Trine en sanglotant lorsqu’elle se vit seule avec son protecteur. Est-ce fini, au moins ?

— Fini ? Je dois ce soir me battre au sabre contre ce mangeur de fer.

— Oh ! et cela à cause de moi ! s’écria la jeune fille en pâlissant et en tremblant de tous ses membres.

— Ne vous alarmez pas de cela, ma fille ; ce n’est que pour rire. Il se tirera encore d’affaire en proposant d’aller boire ensemble ; c’est une manière qu’a ce Wallon de se procurer du genièvre quand sa paie est dépensée. Cela lui arrive deux fois par semaine ; tout le monde connaît la chose. Partons vite ; je vous conduirai à l’infirmerie où est Jean Braems.

Trine paya la bière, et sortit de l’estaminet avec le soldat. Celui-ci la conduisit, tout en causant, deux ou trois rues plus loin, et la quitta en lui disant :

— Voyez-vous là-bas ce soldat assis sur un banc à la porte d’une grande maison ? Eh bien, c’est là qu’est l’infirmerie. Il faut parler à ce soldat. Il vous laissera entrer, si c’est possible. Bon retour au pays et bien des compliments à mon père, si vous en avez l’occasion.

— Merci mille fois, mon ami ! répondit Trine en le quittant pour se rendre à l’infirmerie.

Lorsque la jeune fille se trouva seule, une triste inquiétude s’empara de nouveau de son âme, et elle se sentait à peine le courage d’adresser la parole au soldat assis sur le banc. Cependant, à mesure qu’elle appro-