Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/253

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chait de l’infirmerie, un sourire de joie vint éclairer son visage. Il lui sembla reconnaître le soldat. En effet, à quelques pas de distance, elle l’appela par son nom : c’était le fils de Baptiste le jardinier, ce même Kobe dont Jean avait annoncé dans sa lettre la nomination comme caporal, et il se trouvait assis sur le banc en qualité de caporal-planton.

Aussitôt qu’il aperçut la jeune fille, il se leva avec une exclamation, et courut à elle en s’écriant avec une joyeuse surprise :

— Est-ce bien vous, chère Trine ? Seigneur Dieu, quel plaisir de vous voir ! Comment ça va-t-il dans notre village ? Ma mère est-elle guérie ? Comment se porte Charlotte Verbaets ? Savent-ils là-bas que je suis devenu caporal ? Qu’a dit Charlotte en apprenant cela ?

— Cela va toujours bien, répondit Trine. Votre mère était déjà dimanche à la grand’messe ; elle est quitte de la fièvre, et il serait mal aisé de voir qu’elle a été malade. — J’ai dit moi-même, en passant, à Charlotte que vous êtes devenu officier…

— Eh bien, n’a-t-elle pas ri ?

— Non, elle est devenue rouge jusqu’aux cheveux ; mais elle était tout de même si contente qu’elle ne savait plus parler ; je l’ai bien vu dans ses yeux.

Robe le caporal pencha lentement la tête et fixa les yeux sur le sol ; l’expression de sa physionomie changea tout à coup ; lui aussi sentait la rougeur de l’émotion monter à ses joues et son cœur battre à coups précipités. Le village natal avec sa bruyère et ses bois, le timide regard de sa bien-aimée, l’affectueux sourire