Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/256

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que Charlotte vous écrive une lettre dès que je serai revenue à la maison.

— Elle ne sait pas écrire, Trine ! dit le caporal avec un soupir.

— Je le sais, moi ! répliqua la jeune fille ; je le ferai pour elle, et je mettrai dedans des choses qui vous feront sauter de joie.

— Trine, je ne suis pas ici en sentinelle ; je suis planton, et il ne m’est pas défendu de parler avec les gens. Venez vous asseoir sur le banc sans laisser rien voir jusqu’à ce que le sergent soit sorti. Je dirai que vous êtes ma sœur ; autrement il se mêlera encore de la chose. Causons un peu des amis de là-bas. Est-ce que Nicolas, le fils du brasseur, est marié avec la servante d’écurie du fermier Dierikx ? Et le poulain que nous avons vendu au baes de la Couronne, est-il devenu un beau cheval ?

Ils s’assirent sur le banc en laissant avec intention un certain espace entre eux, et se mirent à parler des absents

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Dans l’hôpital des ophthalmiques, il y avait une chambre étrange : les fenêtres en étaient closes par des paravents de papier vert foncé ; pas un rayon de soleil n’y pouvait pénétrer. Pour ceux qui voyaient, c’était un morne réduit où une teinte plus triste que la plus profonde obscurité couvrait tous les objets de reflets funèbres et serrait le cœur des spectateurs d’une angoisse et d’une terreur secrètes. À proprement parler, il n’y faisait ni jour ni nuit ; mais il fallait d’abord être habitué à ce vert