Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/26

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fants ; aussi approuva-t-elle le dessein de son mari, et elle répondit :

— Oui, va au marché du vendredi et vends le bac à moules, car notre pauvre petit Jean se meurt de faim ; moi-même je me soutiens à peine sur mes jambes, et ce pauvre innocent agneau qui est là à gémir… Oh ! que n’es-tu déjà un ange dans le ciel, mon enfant bien-aimé !

Les larmes recommencèrent à couler ; une secousse pareille à celle qu’il avait déjà ressentie ébranla le corps de l’ouvrier, et ses poings se crispèrent de nouveau avec un craquement. Il se contint cependant, et franchit la porte, en proie à un violent désespoir.

Bientôt on entendit le bruit d’une charrette poussée avec rapidité, et ce bruit ne tarda pas à s’éteindre dans l’éloignement.

III


Sur le marché du vendredi, du côté de la ruelle du Faucon, se trouvait parmi d’autres objets une petite charrette à deux roues, semblable à ces charrettes à la main qu’on nomme à Anvers bac à moules, parce qu’elles sont principalement employées au transport de ces mollusques. Non loin de là se tenait un homme qui semblait en proie à un profond abattement : les bras croisés sur la poitrine, il portait continuellement ses yeux humides du bac à moules au crieur, qui était occupé un peu plus loin à vendre d’autres meubles. De temps