Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/264

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le sergent et le caporal, descendit l’escalier jusqu’à la cour. Là, elle se laissa entraîner sans conscience, car ses jambes se refusaient machinalement aux mouvements qui devaient l’éloigner de Jean. Elle ne disait néanmoins pas un mot ; les larmes silencieuses qui ruisselaient sur ses joues étaient le seul indice de sa douleur.

Sur le seuil d’une des portes qui s’ouvraient dans la cour se tenait une dame richement vêtue et d’une physionomie noble et douce. Elle vit de loin la jeune fille en pleurs et parut curieuse de savoir ce qui se passait. À mesure qu’on se rapprochait de la porte, son regard prenait l’expression d’une pitié profondément sentie.

Trine s’en aperçut ; un rayon d’espoir pénétra dans son âme. Cette émotion n’échappa pas non plus à Kobe ; il souffla à l’oreille de la jeune fille :

— C’est la femme du directeur de l’infirmerie : oh ! une excellente personne ! Elle est d’Anvers.

La jeune fille pressa le pas, et parut elle-même avoir hâte de franchir la porte ; mais arrivée près de la dame, elle courut soudain à elle en gémissant, et tomba à genoux à ses pieds en lui tendant des mains suppliantes et en s’écriant :

— Ah ! madame ! secours, pitié pour un pauvre aveugle !


La dame parut surprise et embarrassée de cette génuflexion inattendue ; elle contempla un instant avec étonnement la jeune paysanne, qui fixait sur elle ses beaux yeux bleus comme une prière de l’âme, et qui, au milieu de ses larmes d’espoir, souriait comme si elle eût