Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/268

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— Seriez-vous contente, lui demanda-t-il, si votre ami pouvait retourner avec vous à la maison ?

La physionomie de trine s’illumina soudain d’une expression où se mêlaient la joie et l’anxiété, et qui échappe à toute description. Ses grands yeux bleus, tout fixes ouverts, semblaient attendre d’autres paroles de la bouche de l’officier. Enfin, sa voix éclata :

— Contente ? joyeuse ? s’écria-t-elle. Je suis toute hors de moi de vous entendre me demander cela. Oh ! monsieur, monsieur, ne me trompez pas en me donnant une telle espérance ! Je ramperai à vos pieds, et je les baiserai par reconnaissance !

L’officier se hâta de prendre son shako, ceignit son sabre, et sortît en disant :

— Ayez bon courage, ma fille : je réussirai peut-être. En tout cas, vous pourrez revoir Jean ; j’y veillerai.

D’inintelligibles accents de gratitude suivirent l’officier jusque dans la cour ; Trine commença alors à remercier avec feu sa bienfaitrice ; mais celle-ci ne lui donna pas le temps d’épancher les sentiments qui débordaient de son cœur. Elle courut à la cuisine, et revint bientôt après avec une servante qui plaça Une petite table devant Trine, et y servit de la viande, du pain et de la bière.

— Mangez et buvez tranquillement, ma fille, dit la dame ; cela vous est offert de tout cœur.

— Ah ! je le sais bien, madame, répondit Trine en soupirant ; mais, ai-je mérité ce que vous faites pour moi ? C’est comme si vous étiez ma mère. Dieu vous en récompensera !