Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/287

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— Moi aussi j’y ai vu des roses et des lis ! Comment cela se peut-il ? J’en perds la tête.

— Ah ! ma bonne amie, dit Jean avec un soupir, ne te laisse pas tromper par une fausse espérance. Songe est mensonge, dit le proverbe ; ce n’est qu’une consolation que Dieu nous a envoyée pendant le voyage.

— C’est égal ! s’écria la jeune fille avec joie, il me semble que, depuis cette nuit, j’aime encore mieux la Mère de Dieu qu’auparavant… Quand nous serons à la maison, j’irai demander au sacristain du papier d’argent pour faire à la Vierge du tilleul une couronne de sept étoiles… et si jamais en notre vie nous pouvons le faire, elle aura aussi une robe avec des fleurs d’or. Mais avançons un peu plus vite avant que le soleil soit plus haut, et prends le bâton, car le sentier devient étroit et raboteux. Je crois que nous nous sommes perdus avec toutes ces causeries.

— Chère Trine, il faut faire attention au chemin, car mes jambes commencent à se fatiguer ; je sens que je ne pourrai marcher pendant dix heures aujourd’hui.

— Ne t’inquiète pas, Jean, répondit la jeune fille en ralentissant le pas ; sur une bruyère unie comme celle-ci, on arrive toujours… et je vois là-bas deux tours, Moll et Baelen, comme on nous l’a dit ce matin.

— À quelle distance sont-elles, Trine ?

— Une lieue et demie environ. Pourras-tu ce matin aller jusque-là ?

— Oui, en nous reposant de temps en temps en chemin.