Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/289

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Elle amena l’aveugle au bord du ruisseau, jeta le sac sur l’autre rive et se laissa glisser dans l’eau ; le jeune homme l’entendit :

— Que vas-tu faire, Trine ? demanda-t-il.

— Jette tes bras à mon cou et tiens-toi bien, répondit la jeune fille, qui prit le soldat par la main, l’attira vers elle et le contraignit doucement à obéir à son ordre, malgré ses observations.

Chargée de son lourd fardeau, elle gagna d’un pas chancelant l’autre bord et dit :

— Jean, voici des saules ; tiens-toi ferme aux branches : je t’aiderai.

Le soldat fit ce que lui recommandait Trine et atteignit la rive sans trop de peine. La jeune fille le rejoignit et secoua l’eau qui avait éclaboussé ses vêtements.

— Oh ! dit l’aveugle, tu es la bonté et le dévouement même, Trine… Je suis bien triste de ne pouvoir te récompenser de l’affection et de la pitié que tu as pour moi.

— Allons donc, Jean, dit-elle en l’interrompant, cela vaut bien la peine d’en parler ! Je t’ai porté de l’autre côté de l’eau, voyez la belle affaire ! Le soleil aura bientôt séché mes habits. Remettons-nous en route tout doucement. Dans une demi-heure, nous arriverons au premier clocher ; ce doit être Moll : nous nous y reposerons longtemps.

— L’eau du ruisseau est-elle claire ? demanda le jeune homme.

— Comme du verre ! As-tu soif ? Attends ; je puis bien me mouiller encore un peu : je vais te donner Un bon coup à boire.