Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/293

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en pressant sa main d’une frémissante étreinte, si c’était vrai, vois un peu quelle heureuse vie nous aurions sur la terre ! Nous ferions ce que tu m’as si généreusement promis ; nous nous marierions. Je travaillerais comme un esclave, mais avec courage, avec bonheur ; toi, ma femme bien-aimée, tu n’aurais plus rien à faire que te reposer…

— Non pas, Jean, dit Trine en souriant ; tu penses sans doute que mes bras pourraient s’habituer à la paresse ; c’est ce que tu verras !

— C’est égal, reprit le jeune homme, tu ne ferais que ce que tu voudrais, et rien de plus. Et nos parents, Trine, comme ils seraient heureux jusqu’au dernier jour de leur vieillesse, au milieu de notre amour et de nos soins ! J’abattrais le mur qui sépare nos deux chaumières et n’en ferais qu’une seule maison, pour que nous pussions demeurer tous ensemble. Ce serait un paradis de joie et de bonheur !

— Oh ce que tu dis est beau, dit la jeune fille d’une voix émue… Le mur tombera dès notre arrivée, et alors le grand-père, nos deux mères, Paul, toi et moi, et jusqu’à nos bêtes, nous pourrons, toujours nous voir, toujours être ensemble. Quelle vie ! quelle vie !

Trine battit des mains de joie comme un enfant.

— Et puis, poursuivit Jean, nous avons trop peu de terres pour y pouvoir toujours travailler et pour mettre de côté. Je serai marchand de déchets de sapins, et peu à peu de bois et de fagots. Alors il faudra songer à avoir quelque chose sous la main pour le temps à venir ; car…