Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/294

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La voix du jeune homme s’affaiblit, et il dit presque inintelligiblement :

— Car, s’il plaît à Dieu, notre ménage s’agrandira peu à peu…

Il s’arrêta, car au même instant la jeune fille porta les mains à ses yeux, et Jean l’entendit pleurer et sangloter :

— Pourquoi mes paroles t’attristent-elles ? demanda-t-il.

La jeune fille reprit sa main, la pressa doucement, et répondit en soupirant :

— Pour l’amour de Dieu, tais-toi ! ne parle plus de ces belles choses. Mon cœur se brise à t’entendre… mais c’est de joie seulement… Jean, je suis si heureuse que j’en perdrai la tête si tu continues à parler du paradis qui nous attend…

— Et moi donc, Trine ! je ne puis me taire : mon cœur déborde. Laisse-moi continuer et dis aussi quelque chose. Ainsi nous arriverons pleins de joie, et sans le savoir, à Moll pour nous reposer.

Le soldat se reprit à dérouler de nouveau les heureuses perspectives entrevues, et fit apparaître aux yeux de la jeune fille vivement touchée le magique avenir d’une existence passée à deux tout entière, et dont ils savouraient par avance les ineffables félicités.

Enfin ils approchèrent d’une grande commune. Trine donna le sac à Jean, et la main dans la main ils entrèrent dans le village.