Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/335

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

âme, lourde comme une pierre sépulcrale, lorsque des pas d’homme vinrent tout à coup l’éveiller au milieu de son rêve funèbre.

Le long du mur du cimetière, le vieux fossoyeur s’avançait la bêche sur l’épaule. Son extérieur portait les traces évidentes de la souffrance et de la pauvreté ; son dos s’était courbé par l’incessant travail de la bêche. Ses cheveux étaient blancs et sa face creusée de rides profondes ; pourtant une lueur d’énergie brillait encore dans son regard.

Au premier coup d’œil, le voyageur reconnut Laurent, son ancien rival, et fut sur le point de courir à lui ; mais les cruelles déceptions qu’il avait rencontrées jusque-là le retinrent et le décidèrent à se taire et à essayer si Laurent le reconnaîtrait encore.

Le fossoyeur s’arrêta à quelques pas, et après l’avoir examiné avec une visible curiosité, il se mit à tracer dans le gazon un carré long, afin de creuser en cet endroit une nouvelle fosse. Toutefois il ne cessait d’observer par un regard oblique celui qui était assis devant lui ; bientôt une maligne joie brilla dans ses yeux.

Le voyageur, se méprenant sur l’expression qu’avait prise la figure du fossoyeur, sentit battre son cœur en attendant que Laurent vint à lui et prononçât son nom.

Mais le fossoyeur lui jeta de nouveau un regard railleur, plongea la main dans la poche de sa misérable veste et en retira un vieux calepin enveloppé de sale parchemin et auquel était suspendu un crayon par un cordon de cuir. Il se détourna et parut écrire sur le calepin.

Ce fait, accompagné de l’expression triomphante des