Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/357

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— Holà, je m’y oppose ! dit son compagnon. Puisque nous allons de conserve à la recherche d’histoires, la trouvaille doit être loyalement partagée.

— Soit ! soit ! nous tirerons tout à l’heure à la courte-paille ! dit le jeune poète à demi attristé.

— Avec tout cela, reprit l’autre, nous ne savons encore rien. Allons, Baes Joostens, ôtez-moi ce vilain col de vos oreilles, et contez-nous l’affaire comme un ami que vous êtes. Vous aurez le livre pour rien quand il sera imprimé.

— C’est impossible maintenant, répondit le Baes. J’entends ma femme qui descend l’escalier ; mais venez avec nous jusqu’au village ; chemin faisant, je vous dirai pourquoi on tire le canon et pourquoi on fait de la musique…

L’hôtesse entra dans la chambre avec une parure dont le rouge vif, le jaune et le blanc éblouirent les yeux du plus jeune des voyageurs.

Elle courut à son mari, haussa encore le col de celui-ci et prit son bras en se dirigeant vers la porte.

Les deux jeunes gens les suivirent. Baes Joostens raconta tout en marchant à ses auditeurs avides toute l’histoire du long Jean et de Rosa l’aveugle, et bien que son récit l’eût mis presque hors d’haleine, les voyageurs ne se firent pas faute de l’accabler de questions.

Il leur dit aussi comment monsieur Slaets lui avait acheté le vieux coucou et lui avait promis cinquante florins par an, à condition qu’il mettrait l’antique horloge dans son auberge ; — comment le long Jean avait passé trente-quatre années en Russie et y était devenu riche à