Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/358

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trésors en faisant le commerce des pelleteries ; — comment il avait acheté la maison de campagne délaissée par la vieille dame morte, et allait l’habiter avec Rosa et la famille de Nélis, le faiseur de balais, dont il avait adopté tous les enfants comme siens ; — comment il avait donné beaucoup d’argent au fossoyeur, — et enfin comment il y aurait ce même soir grande fête au château pour les paysans, à preuve qu’on y devait rôtir un veau tout entier et cuire deux chaudières pleines de riz au lait.

Baes Joostens parlait encore, lorsqu’au détour d’une maison ils se trouvèrent dans la principale rue du village.

Les voyageurs n’écoutaient plus le conteur : leurs yeux suffisaient à peine à voir les belles choses qui s’offraient à leurs regards.

Le village entier était orné, le long des maisons, de sapins verdoyants rattachés les uns aux autres par des tentures blanches comme la neige et par de magnifiques guirlandes de fleurs. Çà et là, au-dessus de la tête des spectateurs, flottaient les grandes lettres rouges de chronogrammes de toute espèce. Partout s’élevaient de beaux mais couronnés de cent petits drapeaux ornés de clinquant, de couronnes d’œufs, de morceaux de verre au cliquetis argentin. Sur le sol, au bord du chemin, les garçons et les jeunes filles avaient planté dans le sable de bruyère le plus pur des parterres de fleurs improvisés, où se voyaient reproduits, selon l’usage, les chiffres de Jésus et de Marie. Un seul représentait un JR entrelacé ; cela signifiait ; Jean-Rosa ; le maître d’école en était l’inventeur.