Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/415

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veuve de la Chapelle vous fait accroire ces choses-là. Pourquoi donc m’imputer les mauvaises pensées des autres ?

L’oncle se mit à tousser. C’était chez lui l’indice ordinaire de la fatigue. On pouvait voir sur ses traits qu’il allait faire une sortie violente ; et comme la colère faisait briller ses yeux éteints d’une flamme nouvelle, Mathias tendit les mains vers le vieillard comme pour l’arrêter, et dit d’une voix suppliante :

— Allons, oncle Jean, laissez là l’affaire : Cécile paraît tenir à ce que les choses ne se fassent pas selon votre désir. Eh bien, qu’elle épouse Barthélemy ; c’est elle qui en souffrira le plus.

— Tais-toi ! dit l’oncle irrité ; il parait que toi aussi tu penches vers ces détestables idées… Cécile, puisque tu n’as ni esprit ni raison, c’est à moi de décider pour toi ; il me faut mettre mon expérience à la place de ta folie. Écoute bien. Je te le demande pour la dernière fois : veux-tu, oui ou non, épouser Mathias ? Des larmes ne sont pas une réponse ; je veux que tu parles.

— Ah ! mon oncle bien-aimé, s’écria la jeune fille en tendant les mains vers lui, ah ! si vous saviez ce que vous faites !

— Réponds ! veux-tu Mathias pour mari ?

— Oh ! dit Cécile d’une voix déchirante, si on m’entraînait de force à l’église, je retiendrais ma respiration pour suffoquer en chemin !

— Fi ! quelles épouvantables paroles tu dis là ! Mathias est pourtant un homme comme un autre, dit l’oncle au comble de l’étonnement.