Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/44

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yeux et lui faisait considérer la douleur comme une chose qui ennoblit et sanctifie !

Néanmoins son cœur était ému et précipitait le sang dans ses veines avec plus de violence à mesure qu’il s’enfonçait vers l’intérieur de la ville et s’approchait de la maison où il allait faire une pénible tentative.

Il s’arrêta bientôt devant une porte, et malgré l’admirable puissance qu’il avait sur lui-même, sa main trembla en tirant le cordon de la sonnette.

À la vue du domestique qui lui ouvrait, il redevint maître de lui.

— Monsieur le notaire est-il chez lui ? demanda-t-il.

Le domestique répondit affirmativement, l’introduisit dans un petit salon, et alla avertir son maître.

Demeuré seul, monsieur de Vlierbecke posa précipitamment le pied droit sur le gauche, et s’assura que, grâce à cette attitude, on ne pouvait s’apercevoir du désastre de sa chaussure, il tira sa tabatière d’or et s’apprêta à prendre une prise.

Le notaire entra ; son visage avait un air officieux, et il se préparait à faire un salut poli et prévenant ; mais à peine eut-il reconnu celui qui l’attendait que sa physionomie s’assombrit et prit cette expression de réserve dont on s’arme lorsqu’on prévoit une demande importune à laquelle on veut opposer un refus. Bien loin d’étaler le luxe de paroles qui lui était habituel, le notaire se borna à quelques mots de froide politesse, et vint s’asseoir devant monsieur de Vlierbecke en gardant un silence qui était une muette interrogation.

Humilié et blessé de rencontrer un accueil aussi peu