Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/447

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plutôt mille fois ! Il n’est pas de persécutions que je n’aie à subir. Je suis calomniée, injuriée ; je souffre de la faim ; je succombe d’anxiété et de terreur, et… Mais, pour l’amour de Dieu, Catherine, ne dites pas cela à Barthélemy, je suis maltraitée, frappée, torturée, comme un misérable animal !

— Ciel ! que me dites-vous là ! s’écria Catherine en levant les mains au ciel. Êtes-vous donc dans un coupe-gorge ? Dieu m’en garde ! Moi, en dire un mot à Barthélemy ? Il répandrait du sang, le malheureux… Et votre oncle ? Votre oncle a-t-il donc perdu la tête ?

— Mon oncle ! Pauvre homme, on le trompe, on l’abuse. Tout ce que je dis lui semble mensonge et fausseté : il est ensorcelé, Catherine. Si je pouvais seulement lui parler, à lui seul ; mais il passe les jours entiers en haut, dans le fond de la maison, enfermé et inabordable pour Mathias lui-même. Descend-il pour manger, Mathias est toujours là, et il sait tellement dénaturer mes paroles que tout ce que je dis, tout ce que je fais met mon oncle en colère, comme s’il ne sortait plus de ma bouche que fausseté, tromperie et calomnie ! Souvent j’ai douté moi-même si je ne disais pas de mauvaises choses ou si je n’étais pas folle… Depuis je me suis soumise à mon sort ; je souffre en silence, je courbe la tête, dans la pensée que cette mort lente m’a été réservée par Dieu…

— C’est affreux ! dit Catherine. Pourquoi ne fuyez-vous pas cet enfer et ces démons ?

— Ah ! chère Catherine, plus d’une fois, quand une terreur inouïe me faisait frémir dans l’attente d’un trai-