Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/464

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Que diraient de nous les gens du pays, Barthélemy ? Vous comprenez bien aussi, j’en suis sûre, que cela ne se peut pas.

— Ainsi, Cécile, dit le jeune homme avec l’abattement du désespoir, vous allez à Anvers, vous nous abandonnez ? Peut-être pour rencontrer de nouvelles souffrances et vous voir rebutée et mal menée. Vous me laisserez mourir, vous laisserez ma pauvre mère tomber malade, pour l’opinion des voisins ?

Il attendait une réponse, mais la jeune fille, les yeux fixés sur le sol demeura muette.

Le jeune homme reprit d’une voix plus insinuante :

— Ah ! Cécile, vous coucherez dans la chambre de ma mère et vous serez toujours avec elle ; je vous entourerai de respect et d’amour comme si vous étiez mon ange gardien lui-même ; je travaillerai, je travaillerai depuis le matin de bonne heure jusque bien tard au soir ; rien ne manquera à notre bonheur ; vous vous rétablirez, vous retrouverez la force et la santé ; votre présence sera comme autrefois une bénédiction pour notre maison. Oh ! venez, venez, soyez la sœur de ma sœur, l’enfant de ma mère !…

Les mains jointes, il semblait implorer une réponse. La jeune fille le regarda avec indécision.

— Oh ! Cécile, s’écria-t-il, parlez ; songez qu’au-dessus des hommes il y a dans le ciel quelqu’un qui sait qui fait mal sur la terre !

Un sourire étrange éclaira le visage de Cécile ; elle respirait avec peine, comme quelqu’un qui va prendre une importante résolution.