Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/465

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— Eh bien ? eh bien ? demanda Barthélemy, tout frémissant d’une joyeuse attente.

— Eh bien, répondit la jeune fille, soit ! que votre mère soit ma mère. Je demeurerai sous son toit comme si j’étais son enfant.

Un cri aussi aigu qu’une exclamation de douleur s’échappa de la poitrine du jeune homme, il porta les deux mains à ses yeux ; deux torrents de larmes jaillirent sur ses joues, larmes si abondantes qu’elles passèrent entre ses doigts.

Cécile ne comprit rien à cette violente émotion, et adressa à Barthélemy des paroles de consolation.

— Ah ! répondit-il, tandis qu’un sourire fiévreux rayonnait à travers ses larmes, la joie aussi fait mal ! Elle brise le cœur, elle rend fou… Mais c’est fini. Venez, mon amie, venez.

Ils prirent un autre sentier. Barthélemy était tout métamorphosé. Il marchait la tête haute, le regard fier ; un sang généreux colorait ses joues ; l’enthousiasme du bonheur rayonnait dans ses yeux ; il allait d’un pas déterminé comme si, pour la première fois depuis longtemps, ses membres avaient eu leur libre essor. Mille exclamations de joie se pressaient sur ses lèvres.

— Mon Dieu ! mon Dieu ! disait-il, comme la vie est belle pourtant ! Voyez-vous, Cécile, je travaillerai comme un esclave aux champs, ou je préparerai des cerceaux dans le jardin ; vous ferez comme autrefois des habits pour le monde ; Jeannette soignera la vache, ma mère demeurera avec vous et fera la cuisine… Chacun de nous qui gagnera quelque chose le mettra dans la bourse com-