Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/466

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mune, et nous ferons ainsi des épargnes. Nous achèterons encore une vache et nous prendrons plus de terre en fermage… Et qui sait ? Ô Seigneur, Seigneur ! si cela pouvait arriver ! qui sait ? Nous finirons par prendre une servante… Peut-être la petite ferme de la Chapelle deviendra-t-elle si belle, et la bénédiction de Dieu s’y reposera-t-elle si bien, que vous ne penserez plus au vilain couvent.

— Barthélemy, comme vous parlez bien ! murmura la jeune fille émue. Ce serait le ciel sur la terre…

— Cela sera ! continua le jeune paysan avec la même joie expansive. Je planterai dans notre jardin toutes sortes de belles fleurs, je tracerai des sentiers et des plates-bandes ; je ferai des cages pleines d’oiseaux pour les suspendre tout autour de la maison… Il faut que tout chante et soit en joie !… Et puis j’apprendrai de nouvelles chansons, je raconterai des histoires, je danserai, je sauterai… et je remercierai Dieu tous les jours de ce qu’il a permis que vous veniez chez nous… Mon Dieu, mon Dieu, quelle vie ! chère Cécile, quelle vie ! Voyez là-bas, près du puits… voyez ma mère et Jeannette !

À ces derniers mots il quitta la jeune fille et courut vers la ferme, rapide comme une flèche ; cependant, tout impatient qu’il fût, il eut encore la force de crier :

— Mère ! Jeannette !

La mère se retourna à la voix de Barthélemy, et le vit avec stupéfaction lancé en pleine course. En voyant ses gestes étranges, en entendant son incompréhensible appel, Jeannette, bouche béante, promena son regard de