Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/476

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condamné par une cruelle sentence à mourir lentement de faim.

L’oncle Jean paraissait dormir, mais il ne devait pas en être ainsi, car, à l’entrée de Mathias, il cacha sous sa couverture avec un mouvement convulsif un objet qui rendit un bruit pareil à celui de clefs qui s’entrechoquent.

Mathias vit ce mouvement et entendit ce bruit : un sourire rusé passa sur son visage, et il parut tendre l’oreille pour mieux saisir le son du fer. Puis il s’approcha du lit, posa sur la table le pot fumant et dit au vieillard d’une voix très-rude :

— Hé ! oncle Jean, voici votre manger !

Le malade fit effort pour se mettre sur son séant, mais, après une pénible tentative, il retomba lourdement sur sa couche.

— Je suis à bout de forces ! dit-il en soupirant ; oh ! mon cher Mathias, cette nuit a été bien mauvaise pour moi !

— Je vous aiderai ! dit Mathias en étendant les mains vers lui.

— Oh ! non, non ! dit le vieillard avec angoisse comme s’il eût redouté cette aide.

Mais Mathias n’eut pas égard à sa frayeur, passa ses bras sous le torse de l’oncle Jean, le souleva brusquement, et l’adossa comme un morceau de bois contre l’oreiller.

— Aïe ! Aïe ! tu me fais mal ! dit le malade d’une voix plaintive :

— Je vous fais mal ? demanda Mathias avec une feinte