Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/480

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— Ce n’est pas tout encore ? demanda Mathias avec mauvaise humeur.

— Ah ! ne sois pas si rude pour moi ! dit le vieillard. Vois-tu, Mathias, cette nuit j’ai eu peur de mourir, et cette peur m’a donné la sueur de l’agonie. Sais-tu pourquoi ? Si j’étais mort sans confession !

— Qu’est-ce que cette idée-là ? s’écria Mathias avec une anxiété mal dissimulée.

— Mathias, cher Mathias, dit le vieillard d’une voix suppliante, ne serait-il pas bon que le curé vînt ? que je me préparasse ? car, qui sait ? Dieu nous appelle à lui si à l’improviste !

Pas de réponse. Mathias, les bras croisés sur la poitrine, regardait le vieillard avec étonnement.

— Et Cécile, reprit celui-ci, Cécile ! je voudrais bien la voir une fois encore avant de mourir. Elle a mal agi, elle est coupable ; mais cependant je rêve toujours d’elle ; et ne faut-il pas que je lui pardonne avant de paraître devant Dieu ?

— Plus vous parlez, mieux vous dites ! s’écria Mathias : en vérité, je commence à croire que vous êtes tout à fait malade, non pas du corps, mais de la cervelle. Cécile se raille de vous ; elle demeure avec son amoureux et se moque pas mal de vous. Je lui ai demandé si elle voulait vous voir, elle m’a répondu que vous pouviez très-bien partir pour l’autre monde sans sa visite.

Le vieillard laissa tomber la tête sur sa poitrine et essuya deux grosses larmes :

— Soit ! poursuivit Mathias, appelez le curé, appelez le médecin ; ouvrez la maison à qui veut y entrer, mais