Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/484

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Elle joignit les mains et ajouta avec effusion :

— Mathias, cher Mathias, ah ! laissez-moi le voir ! pour un instant seulement ; cela le soulagera peut-être dans ses douleurs.

— Vous vous trompez, répondit Mathias ; moi-même je lui ai demandé vingt fois peut-être si je devais vous appeler auprès de lui ; mais jusqu’ici mes efforts n’ont pas réussi. Il est si irrité contre vous qu’il ne peut entendre prononcer votre nom sans entrer en colère… et cela n’est pas bon pour la goutte.

Cécile, le tablier sur les yeux, pleurait et sanglotait :

— Ô mon Dieu, quel mal lui ai-je fait ? Lui que j’aime toujours comme un père, lui que je vois sans cesse dans mes rêves ! Être irrité contre moi, me haïr ? moi qui depuis mon départ n’ai pas versé une seule larme que ce ne fût à cause de lui ! S’il savait l’amour que je lui porte, il ne me repousserait pas si cruellement,

— Ce que vous dites, Cécile, est en effet bien vrai, dit Mathias ; mais les vieilles gens ont d’étranges caprices. Consolez-vous donc, je ferai encore des efforts pour vaincre sa rancune. J’ai déjà beaucoup gagné : il n’est plus aussi méchant qu’autrefois. Je le connais : dans quelques jours je le ferai bien changer d’idée… et alors je viendrai vous appeler.

— Soyez assez bon pour cela, Mathias ; je vous en saurai gré aussi longtemps que je vivrai.

— Allons, Cécile, je suis forcé de vous quitter ; ayez bon courage.

— Et s’il arrivait d’ici là qu’il devînt tout à fait malade, Mathias ?