Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/486

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— Il paraît qu’on ne m’aime pas plus qu’il ne faut ici, grommela Mathias ; si la mère n’est pas plus aimable que l’enfant, je ne ferai pas de grandes affaires.

À ces mots, il entra dans la cabane, considéra tous les objets qui s’y trouvaient avec un ton railleur en se disant :

— Elle n’a pas gras la veuve ; tout ce que je vois ici ne vaut pas dix stuivers. Je commence à croire que je réussirai : l’argent doit être puissant dans une niche pareille… Asseyons-nous et attendons un peu ; l’enfant est peut-être allée chercher sa mère.

En effets il ne se trompait pas ; la petite fille s’était sauvée vers un champ où sa mère travaillait, et, toute tremblante de peur, elle lui avait annoncé la venue de Mathias.

À cette nouvelle, la veuve parut d’abord saisie d’étonnement. Que pouvait lui vouloir l’odieux fourbe ? Elle demeura longtemps, le regard fixé sur la terre, à chercher une réponse à cette question. Peu à peu cependant un sourire se dessina sur son visage, sourire dans lequel une maligne expression s’unissait à un certain sentiment de joie.

Elle laissa son enfant aux champs, auprès des autres femmes, et s’achemina, en réfléchissant, dans la direction de sa chaumière.

— Mathias qui me rend visite ! pensait-elle ; qu’est-ce que cela peut signifier ? Il doit être arrivé quelque chose, ou du moins une grave affaire est en train ? Je sais qu’il a peur de moi ; il tremble quand il me voit. Ainsi il ne vient pas par amitié ; il y a quelque anguille sous roche.