Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/497

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de la flamme tremblotte sur ses traits : on dirait une lampe funéraire qui jette ses derniers reflets sur les joues livides d’un cadavre.

Auprès de la table Mathias est assis sur une chaise. Il voulait veiller auprès du malade, mais le sommeil l’a saisi, et il dort la tête appuyée contre le dos de la chaise.

Ses traits odieux sont éclairés aussi ; — à cette heure où le repos devrait détendre tous les ressorts de sa physionomie, son âme perverse y laisse encore son empreinte et un rictus méchant contracte sa large bouche. Par moments ses lèvres s’agitent, son front se plisse en rides nombreuses ; des mouvements nerveux, expression d’une colère intérieure, courent sur son visage. Il est visible qu’il rêve.

Le vieillard a rouvert les yeux ; il voit l’agitation convulsive des traits de Mathias. Sa vue s’arrête avec terreur sur cet effrayant spectacle. La conscience et la réflexion se réveillent en lui ; son regard fait le tour de la chambre ; il contemple la lampe dont la faible et triste lueur vacille dans les ténèbres comme un feu follet, et reporte avec une indicible angoisse les yeux sur le visage de Mathias. Celui-ci grince des dents en rêvant, ses lèvres se retroussent comme s’il voulait mordre : l’expression de sa physionomie est si cruelle et si féroce que le malade tout tremblant ferme les yeux… mais un nouvel incident le force à les rouvrir.

Quelques sons s’échappent de la bouche de Mathias ; il semble parler. Sa physionomie change ; l’expression de colère disparaît ; il sourit et semble tout heureux. Il parle les yeux fermés ; tout n’est pas intelligible ; parfois