Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/503

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Un râlement lugubre se fit entendre, les membres du vieillard se raidirent tout frémissants et retombèrent inanimés.

Mathias saisit les clefs et brisa d’une seule secousse le cordon par lequel elles étaient attachées au cou de l’oncle Jean. — Il s’éloigna lentement du lit.

Il s’arrêta, s’appuyant d’une main sur la table, tremblant d’effroi ou de fatigue, à ce point que le tremblement se communiquait au plancher. Son œil était fixé sur le corps immobile de sa victime ; une sueur froide perlait sur son front et ses joues.

Peut-être se repentait-il ; peut-être les conséquences de son épouvantable forfait le faisaient-elles frémir. Quoi qu’il en fût, il demeura longtemps comme anéanti, jusqu’à ce qu’enfin un bruit rauque et effrayant s’échappa de sa gorge contractée.

Il prit la lampe machinalement et d’une main incertaine, s’approcha de la porte et l’ouvrit.

Un cri d’angoisse lui échappa… La mendiante était devant lui ! Placée derrière la porte, peut-être avait-elle entendu, peut-être avait-elle vu par le trou de la serrure ce qui venait de se passer !

Mathias, les yeux étincelants, regarda la femme, qui ne paraissait pas savoir la cause de son émotion ; il leva le trousseau de clefs comme s’il eût voulu l’en frapper à la tête.

— Que venez-vous faire ici ? hurla-t-il.

— Je croyais que vous m’aviez appelée, répondit la mendiante en reculant et avec l’intention visible de s’échapper. Est-ce peut-être l’oncle Jean qui a appelé ?