Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/548

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à réunir ces branches en un gros fagot. Bien qu’une très ancienne coutume permette aux pauvres gens de ramasser le bois sec dans les sapinières, baes Gansendonck ne pouvait souffrir qu’il en fût ainsi. Le bois sec était sa propriété tout aussi bien que le bois vert, et nul ne devait toucher à sa propriété. Ajoutez à cela que c’était une femme, et qu’il n’avait à craindre ni résistance ni moquerie. Cela lui donna du courage et lui permit de lâcher la bride à sa colère.

Il saisit la pauvre mère par les épaules en s’écriant :

— Impudents voleurs ! Allons, marchez au village avec moi ! dans les mains des gendarmes ! En prison, fainéants vauriens !

La femme tremblante laissa tomber le bois qu’elle avait ramassé, et fut tellement épouvantée par ces terribles menaces, qu’elle se mit à pleurer sans prononcer une parole. Les deux enfants se cramponnèrent aux vêtements de leur mère et remplirent le bois de cris désespérés.

Kobe hochait la tête avec dépit : l’expression d’indifférence habituelle à sa physionomie avait disparu ; on eût dit qu’un sentiment de pitié s’était emparé de lui.

— Ici, coquin ! lui cria le baes ; donne-moi un coup de main pour conduire ces brigands aux gendarmes !

— Cher homme, je ne le ferai plus jamais ! dit la femme d’une voix suppliante. Voyez mes pauvres petits agneaux d’enfants ; ils se meurent de peur !

— Tais-toi, vagabonde, s’écria le baes ; je te déshabituerai bien de marauder et de voler !

Le domestique prit la femme par le bras avec une