Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/549

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feinte colère et la secoua vivement ; mais en même temps il murmura à voix basse à son oreille :

— Tombez à genoux et dites Monsieur.

La femme se précipita à genoux devant baes Gansendonck, tendit les mains vers lui et dit d’un ton de prière :

— Oh ! monsieur, monsieur, grâce, s’il vous plaît, monsieur ! Oh ! pour mes pauvres petits enfants, grâce, mon cher monsieur !

Le baes parut touché par un mobile secret. Il lâcha la femme, la regarda d’un air rêveur, le visage radouci et bienveillant ; cependant il ne la fit pas se relever.

Quelqu’un agenouillé devant lui ! les mains tendues vers le ciel ! et demandant grâce ! c’était royal !

Après avoir savouré quelques instants ce suprême bonheur, il releva lui-même la pauvre femme, essuya une larme d’attendrissement qui perlait dans ses yeux et reprit :

— Pauvre mère, j’ai été un peu vif, mais c’est fini. Reprenez votre fagot ; vous êtes une brave femme. Désormais vous pouvez casser le bois mort dans toutes mes propriétés, et quand même il s’y trouverait un peu de vert, je ne dirais rien. Rassurez-vous, je vous pardonne entièrement.

La femme contemplait avec étonnement les deux singuliers personnages qui étaient devant elle, le baes avec son air de protection, le domestique se mordant les lèvres et faisant de visibles efforts pour ne pas rire.

— Oui, petite mère, répéta le baes, vous pou-