Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/555

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Saint-Sébastien et tombait comme une teinte rosée sur le front d’albâtre d’une jeune fille.

Lisa Gansendonck était assise près de la fenêtre devant une table. Elle songeait, car ses longs cils noirs étaient baissés et un calme sourire voltigeait sur sa bouche, tandis que, par intervalles, une légère rougeur venait colorer ses joues pâles et attester l’émotion qui agitait son cœur. Alors elle se redressait soudain sur sa chaise, une flamme plus vive brillait dans ses yeux, et son sourire s’accentuait davantage comme si elle eût été en proie à un sentiment de bonheur.

Elle prit un journal français d’Anvers qui était déployé devant elle, mais, après en avoir lu quelques lignes, elle retomba immobile dans sa première attitude.

Qu’elle était ravissante ainsi, posée comme une de ces charmantes créations qui n’appartiennent qu’au monde des rêves, au milieu du plus profond silence, éclairée par les chauds rayons du matin, pâle et délicate, jeune et pure comme une rose blanche à demi fermée et dont le cœur doit s’ouvrir à la prochaine aurore.

Des accents vagues et incertains, comme la mourante plainte d’une harpe lointaine, tombèrent de ses lèvres. Elle disait en soupirant :

— Oh ! l’on doit être heureuse à la ville ! Un bal pareil ! Toutes ces riches toilettes, ces diamants, ces fleurs dans les cheveux, ces robes si riches que leur valeur suffirait à acheter la moitié d’un village ; tout resplendit d’or et de lumière ! Et avec cela l’urbanité, le beau langage… Oh ! si je pouvais voir cela, ne fût-ce qu’à travers la fenêtre.