Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/564

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senti quelque crainte, mais il avait été assez vivement impressionné pour n’avoir plus envie de rire et de badiner. Cet incident accrut l’irritation du baes, qui frappait du pied en grondant sourdement. Lisa, qui croyait que les dures paroles de son père avaient seules blessé le jeune homme, baissait les yeux et semblait prête à pleurer. Karel était assis immobile sur sa chaise, encore un peu pâle et tremblant, mais la physionomie remise.

Soudain Victor se leva, prit son fusil et dit à ses compagnons :

— Allons, faisons encore un tour de chasse. Mademoiselle Lisa voudra bien me pardonner, si sans le savoir, j’ai pu dire quelque chose qui ne lui fût pas agréable.

— Qu’est-ce ? qu’est-ce ? s’écria le baes, tout ce que vous avez dit était parfait et accompli. Et j’espère bien que ce n’est pas la dernière fois qu’elle vous verra et vous entendra.

— Mademoiselle Lisa pense peut-être autrement, bien que mon intention ait été de lui témoigner du respect et de l’amitié.

Voyant que sa fille ne répondait pas, le baes entra en colère contre elle :

— Çà, que signifie cette sotte conduite de paysanne ? Lisa, Lisa, pourquoi rester là comme une innocente ! Réponds, et vite !

Lisa se leva et dit en flamand d’un ton froid et poli :

— Monsieur Van Bruinkasteel, ne prenez pas en mal qu’une chose autre que vos paroles m’ait rendue interdite. Tout ce que vous avez eu la bonté de me dire m’a