Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/567

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— Mais, Karel, je ne vous comprends pas ! Que voulez-vous donc que je fasse ? Si vous étiez à ma place comment vous comporteriez-vous quand des messieurs étrangers viendraient vous adresser la parole ?

— C’est une affaire de sentiment, Lisa, répondit le jeune homme en hochant la tête ; je ne sais moi-même que vous conseiller ; mais, par exemple, quand ce seraient de beaux faiseurs de compliments comme ceux-ci, je leur répondrais bien avec politesse, mais sans souffrir qu’ils vinssent s’asseoir en cercle autour de moi et me remplir les oreilles de vaines paroles.

— Et mon père qui m’y contraint ! s’écria Lisa tout émue.

— On trouve cent raisons pour se lever quand on ne tient pas à rester assise.

— Ainsi à vos yeux j’ai mal agi ! dit en sanglotant la jeune fille, des yeux de laquelle jaillirent soudain des larmes. Je ne me suis pas bien comportée !

Le jeune homme rapprocha sa chaise de Lisa et reprit d’une voix suppliante :

— Lisa, pardonnez-moi ! Vous aussi, vous devez être un peu indulgente pour moi ; ce n’est pas ma faute si je vous aime tant. Le cœur est maître chez moi ; je ne puis le contenir. Vous êtes belle et pure comme un lis ; je tremble à la pensée qu’un mot équivoque, un souffle impur peut vous toucher ; je vous aime avec un respect, avec une vénération pleine d’anxiété ; est-il donc surprenant que les langoureuses œillades de ces jeunes freluquets me fassent frémir ? Ô Lisa, vous croyez que ce sentiment est blâmable. Peut-être en est-il ainsi, en