Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/57

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tation déserte ; les oiseaux se taisent, le vent repose, pas une feuille ne bouge : la lumière seule semble y vivre. À voir cette absence totale de mouvement et de bruit, on croirait la nature plongée ici pour jamais dans un magique sommeil. Le regard cherche en vain à sonder les ténébreuses profondeurs de la végétation abandonnée à elle-même, et l’on se surprend à frissonner comme si cette morne et muette solitude cachait dans son sein quelque lugubre mystère…

Soudain le feuillage s’agite au fond de l’épais bosquet et les branches se courbent bruyamment sous la course rapide d’un être invisible. Une multitude d’oiseaux quittent leur retraite et s’envolent tumultueusement comme s’ils fuyaient à l’approche d’un danger.

La seule apparition d’un être humain apporterait-elle l’animation et la vie là où semblaient régner à jamais le silence et la mort ?

Le bosquet s’ouvre ! Une jeune fille toute vêtue de blanc s’élance hors des coudriers et vole, un filet de soie à la main, à la poursuite d’un papillon. Elle court plus rapide qu’une biche ; le corps tendu, le bras levé, effleurant à peine le sol de la pointe des pieds, elle semble avoir des ailes plus légères que les oiseaux qui, sur son passage, ont abandonné leur asile. Ses cheveux flottent librement en boucles ondoyantes sur son cou charmant. Voyez, elle prend un élan, elle bondit…

Qu’il est gracieux et magnifique, le papillon qui voltige et danse au-dessus de sa tête comme s’il prenait plaisir à jouer avec elle : ses ailes dentelées sont semées d’yeux d’azur, de pourpre et d’or !