Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/58

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Un cri de joie s’échappe de la poitrine de la jeune fille. Elle a failli saisir l’objet de son désir, mais elle a à peine effleuré du bout du filet les ailes du papillon, qui, bien que mutilé, s’élève dans les airs hors de sa portée ; elle le suit tristement du regard jusqu’à ce que ses couleurs se perdent dans le ciel bleu. Un instant encore elle hésite, puis elle prend à pas lents un sentier plus praticable que le chemin qu’elle vient de suivre.

Qu’elle est belle ! Le soleil a légèrement bruni son teint délicat, mais le velouté vermeil de ses joues n’en ressort que mieux, et son visage y gagne une charmante expression d’énergie et de santé. Sous un front élevé, ses beaux yeux noirs brillent à travers de longs cils ; sa bouche finement découpée laisse briller des dents de perle entre des lèvres devant lesquelles pâlirait la rose qui vient d’éclore. Ce ravissant visage est encadré de cheveux flottants qui ondoient sur les épaules et ne laissent entrevoir que de temps en temps la neige d’un col de cygne. Sa taille est svelte et élancée : une simple robe blanche, ceinte d’un modeste ruban, ne dissimule pas ses formes délicates. Quand elle lève la tête et que son regard se perd dans l’azur du ciel, on croirait facilement voir en rêve une fille de l’air ; on la prendrait pour la fée du Grinselhof.

Tantôt elle erre dans les sentiers perdus, absorbée par des souvenirs aimés et savourant les douces émotions qui agitent son cœur ; tantôt, de souriante devenue grave, elle s’arrête, et ses beaux yeux s’inclinent pensifs vers la terre. Elle se rapproche ainsi d’un parterre où des œillets, brûlés par les feux du jour, penchent leur